Accompagner le changement dans les entreprises est le cœur de la mission du cabinet de conseil en ressources humaines Pragma. Pour développer la motivation des salariés, il a mis en œuvre une méthode qui a fait ses preuves : l’enquête de mesure de l’opinion interne. Son équipe de consultants a reçu Responsables.

Une enquête chez un constructeur de bateaux, qui ne parle pas de bateaux… Nicolas Masson s’amuse d’un exemple qui pourrait à première vue ne pas sembler évident. Il est 18h et le soleil descendant vers l’ouest offre une jolie vue depuis les locaux de Pragma, au sixième étage d’un immeuble haussmannien dans le VIIIème arrondissement de la capitale. Le PDG du cabinet a décidé de « mettre l’homme au centre, c’est un vrai sujet, pourtant on le traite de façon périphérique en entreprise ! »

Comment met-on l’homme au centre ? « Par la subsidiarité », répond Nicolas Masson dans un sourire qui promet une explication. Il s’arrête un instant. « La subsidiarité, vous pouvez la méditer chaque jour, vous comprendrez autre chose. » Puis tente un résumé : « Subsidium qui veut dire “aide” en latin… La subsidiarité renvoie au fait de se mettre au service de celui qui est à un échelon inférieur, et de le faire progresser en lui donnant de l’autonomie. » Comprendre son équipe, et analyser les erreurs managériales qui résultent parfois, selon le consultant, de « carences conceptuelles ». Un manque de vocabulaire donc, qui se traduirait par une incapacité à nommer.

Pragma soigne avec des mots, mais pas n’importe lesquels. Entrer dans l’entreprise permet de se rendre compte d’une première chose : on n’y parle pas de “salarié”, “employé” mais de “collaborateur”. Serait-ce l’indice de quelque chose ? Sans aucun doute : « Passer de salarié à collaborateur, c’est transmettre le message aux dirigeants que le corps social est bien le cœur du réacteur. Nous utilisons aussi le terme de collabo-acteur », ajoute le passionné des relations humaines.

To commit, to be dedicated, to undertake… Les Anglo-saxons ont plusieurs mots pour dire l’engagement, glisse Mathieu Jouffray, responsable du développement commercial. L’engagement est pour lui une notion au cœur des préoccupations de son cabinet de conseil.

« Climat social, qualité de vie au travail, enquête psycho-sociale… Les façons de parler de l’enquête diffèrent pourtant le but est bien le même : comprendre l’état d’esprit » des salariés. « Sont-ils inquiets, impatients, réticents à changer ? », interpelle celui qui travaille depuis presque trois ans chez Pragma. « L’analyse de l’opinion interne » permet de soutenir un réel dialogue qui « fait bouger les choses », explique-t-il.

Mais reprenons l’histoire depuis ses débuts. En 1975, la famille Peugeot cherche à mesurer la satisfaction de ses équipes. Auprès des employés, Pragma fait sa première enquête. Quarante ans après et un millier d’enquêtes plus tard, le cabinet poursuit sa route. Il pose son « baromètre social » au cœur des hôtels, dans les hôpitaux, dans des banques, chez des assureurs… « avec le souci qu’il serve autant l’entreprise, que les personnes qui y travaillent. »

Le sens qui est donné compte autant que ce que l’on fait. Nicolas Masson en est convaincu et c’est ce qu’il tente d’appliquer au quotidien avec Pragma. « Nous travaillons avec les sportifs de la Fédération française de voile, pour améliorer leurs performances. À quoi sert ma médaille ? La seconde que je vais gagner, je l’aurai là. » Quand on lui demande où il trouve le souffle, le chef d’entreprise se réfère à la doctrine sociale de l’Église. Il dit être « tombé dedans à 14 ans » avec la lecture des encycliques et de nombreuses discussions familiales. « C’est éblouissant, ça rend intelligent face au monde, c’est un accélérateur d’intelligence », confie-t-il avec recul.

Priscille Aubin est entrée, elle, chez Pragma il y a 5 ans. Elle a lu l’encyclique Rerum novarum. « C’est pas écrit sur notre carte de visite, mais on est pétris de doctrine sociale ! », confirme la jeune femme de 29 ans. Dès son arrivée, elle s’aperçoit d’une dynamique très stimulante intellectuellement. « Chez Pragma les livres circulent, d’un ouvrage de Pierre-Yves Gomez consacré au rapport de l’homme au travail à La pesanteur et la grâce de la philosophe Simone Weil en passant par La blessure de la rencontre, de l’Italien Luigino Bruni… » La conseillère reprend : « Le premier livre que j’ai lu en arrivant, c’est Rerum novarum. En le lisant, je me suis rendue compte de ce qu’on avait à faire… » Car « les évidences sont loin d’être des évidences ». Si vous dites, par exemple, « l’entreprise doit être un lieu d’épanouissement de la personne », illustre Priscille, « tout le monde sera d’accord avec vous. Mais en fait, c’est révolutionnaire ! Comment accompagne-t-on réellement une personne et quelles exigences cela entraîne pour que cette personne puisse s’épanouir ? »

Claire Lauzol s’épanouit-elle dans son travail ? Chez Pragma, on tente de faire le bien chez les autres mais aussi chez soi. Claire travaille depuis 3 ans pour Pragma et depuis « 19 ans dans le conseil ». À côté de son emploi, elle avait toujours eu une vie associative. « Pour la première fois, c’est intégré à mon temps de travail. Dans le cadre d’un bénévolat de compétence, je coache l’association Aux captifs la libération – qui accompagne les gens de la rue. Goûter à cette notion de don réciproque est extraordinaire. Je suis nourrie, reliée à autre chose dans mon univers professionnel. »

Lucile Leclair