Pour conclure l’accord avec le SPD qui lui a permis de se maintenir au poste de chef du gouvernement allemand, Angela Merkel a dû se résoudre à une concession majeure : instaurer un salaire minimum commun à 8,5 €/h (contre 9,43 €/h en France en 2013) applicable à l’ensemble des salariés en 2017.


Pour nombre de pays de l’Union européenne dont les deux tiers bénéficient d’un tel dispositif, cette décision est perçue comme un facteur positif au sens d’une certaine harmonisation des politiques salariales. Elle doit à terme rétablir les bases d’une concurrence plus juste et loyale entre l’Allemagne et ses partenaires, permettant un rééquilibrage des échanges au sein de l’Union.
Ce salaire minimum devrait concerner les 6 millions de travailleurs, qui gagnent moins de 8,5 €/h (soit 17 % de la population active). Parmi eux 2 millions touchent moins de 5 €/h.
En moyenne leurs revenus augmenteront de 37 %, hausse qui devrait stimuler la consommation intérieure (surcoût salarial moyen de 3 % pour les entreprises).

Mais des facteurs importants viennent modérer cette vision optimiste particulièrement prisée en France. Il semble acquis que ce salaire minimum ne sera pas unique comme en France où, rappelons-le, le « i » de smic signifie « interprofessionnel ». On remarque aussi que les grandes entreprises exportatrices, qui emploient peu de personnel non qualifié, seront peu affectées par le dispositif qui ne touchera que marginalement le montant des excédents commerciaux de l’Allemagne (188 milliards d’euros en 2012). S’il y aura partout un salaire minimum, cela ne veut pas dire qu’il sera le même partout. Ainsi on devrait trouver des différences significatives entre länder de l’Est (27 % de la population active seraient concernés par l’instauration) et ceux de l’Ouest. Évidemment les critiques du patronat sont nombreuses, mais les syndicats (8 millions d’adhérents) perçoivent aussi des ambiguïtés dans la mesure. Son impact réel pour les salariés touchés serait finalement peu important pour leur rémunération nette et ils estiment qu’il tirera vers le bas le niveau général des salaires. Au-delà, ces mêmes syndicats craignent une perte d’influence, voyant leurs actions actuelles portées sur la défense des rémunérations passer à l’augmentation du salaire minimum généralisé.

Pour mesurer les retombées réelles de cette mesure, il semble urgent… d’attendre son application concrète : pas avant 2017.

Dominique Semont