Non, l’Union européenne n’est pas qu’un marché de capitaux et de marchandises, ou un club de riches. L’invasion de l’Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine met en lumière l’objectif premier de l’Union : elle est avant tout un ensemble de pays libres qui repose sur la démocratie et les droits humains. Quand Zelenski veut accélérer l’adhésion de son pays, il cherche d’abord à protéger son pays de l’agression du voisin russe. Mais aussi à rejoindre ce pôle de stabilité, de prospérité et de liberté qu’est l’Union.

Cette candidature de l’Ukraine repose avec force la question des frontières de l’Union. Avec elle, se posent celles de la Moldavie, de la Géorgie, mais aussi celles de ces États des Balkans dont on ne sait plus s’ils veulent vraiment intégrer l’Union ou pas : Serbie, Monténégro, Macédoine du Nord, Albanie… Dans ces pays, les opposants à l’Union, soutenus par la Russie et la Chine, sont de plus en plus nombreux. Les intégrer à l’Union risque de faire entrer dans le club des opposants déterminés qui saperont l’unité européenne, qui, avec la Hongrie d’Orban et la Pologne de Kaczynski, n’en a pas vraiment besoin. Mais comment refuser l’adhésion à des pays qui frappent à la porte depuis plus de dix ans quand on souhaite accélérer celle de l’Ukraine ? La réponse se trouve probablement dans la solution proposée par la France de créer une Communauté politique européenne (CPE), qui pourrait constituer une étape pour tester la sincérité de ces pays, les associer à la défense européenne et leur permettre de mieux résister à l’attraction russo-chinoise.

Le risque est que ces pays restent éternellement dans cette salle d’attente et n’intègrent jamais l’Union. Avec les pays qui refusent l’Euro, ceux qui veulent faire cavalier seul pour la défense, l’immigration, l’énergie, on risque de se retrouver avec une Europe à géométrie variable, dont l’unité sur les questions géostratégiques et de sécurité sera de plus en plus problématique. La menace russe a beaucoup fait avancer l’unité européenne. Il ne faudrait pas que celle-ci bute sur la question des nouveaux entrants. La réunion de tous les Européens à Chisinau, capitale de la Moldavie, cette semaine pour la deuxième réunion de la CPE devrait permettre de savoir quel est l’avenir de cette nouvelle structure.

Claude Bardot, ancien co-responsable du secteur Nord des Hauts-de-Seine, secrétaire général de la section des Hauts-de-Seine du Mouvement européen