Si le titre du livre est accrocheur, le sous-titre illustre beaucoup mieux le propos de l’auteur Thomas Jauffret, spécialiste de la doctrine sociale de l’Église et cofondateur de la récente revue Boussole. Il ne fait pas une simple application des encycliques sociales à l’économie numérique, il met en lumière les convergences, les interactions, mais aussi les possibles antinomies entre les deux réalités, pour faire réfléchir ceux qui baignent dans l’une ou l’autre.

Ainsi, l’auteur établit un certain parallèle entre le principe de destination universelle des biens, repris dans les encycliques sociales et les organisations « open source », où certains produits et services sont mis à disposition de tous par l’économie numérique.

Il souligne que l’attention aux besoins du client dans la mise au point d’un produit nouveau est aussi une attention au « prochain » et que, dans ce processus, le succès vient souvent des initiatives prises spontanément par des équipes motivées, hors de toute directive de la hiérarchie. On n’est pas loin du principe de subsidiarité prônée par les encycliques sociales.

Plus loin, il rappelle que la multiplication fantastique des monastères et la construction des cathédrales se sont faites dans un esprit d’aventure, de système dynamique et soudé, alliant savoir et utilisation fertile des richesses. Les start-up de la Silicon Valley ont transposé ces bases.

Nul jugement de l’auteur dans ce travail original sur les fondements anthropologiques de l’économie numérique. Plutôt un regard aiguisé et émerveillé par la créativité qui s’y manifeste.

Toutefois, si l’auteur, chrétien, note une dimension véritablement spirituelle dans les objectifs affichés par les pionniers de l’économie numérique, il sait aussi rappeler les lignes de rupture, et particulièrement l’option préférentielle pour les pauvres, indissociable de l’appel du Christ à ce que nous soyons des serviteurs.

Arnaud Laudenbach

Dieu, l’entreprise, Google et moi, Thomas Jauffret, Salvator, 2018, 195 pages, 20 €