Comme souvent dans l’histoire de l’Europe, cette crise du Covid-19 est révélatrice de l’état de l’Union et peut être l’occasion de son éclatement ou de son renforcement. Dans un premier temps, c’est le chacun pour soi : on ferme les frontières, on décide dans son coin des mesures à prendre, sans aucune coordination – la santé ne fait pas partie des compétences communautaires – on refuse de vendre du matériel médical à ses voisins. On fait comme si l’Union n’existait pas.

Puis un début de solidarité se met en place : les pays les moins touchés viennent au secours de leurs voisins et ouvrent leurs services de réanimation. On réalise que les autres connaissent les mêmes problèmes, qu’on ferait peut-être mieux de coordonner les actions et de prévoir un plan communautaire d’aide à la sortie de crise. Après avoir crié bien fort qu’ils n’accepteraient pas une mutualisation des dettes par un système de « coronabonds », les « fourmis » du Nord réalisent qu’on ne peut pas laisser les « cigales » du Sud mourir : ce sont aussi leurs clients, et ce serait la fin de l’euro. Alors la BCE puis la Commission ouvrent les vannes du crédit d’abord, puis des subventions avec le plan Merkel-Macron. Comme toujours avec l’Union, on commence par dire non, puis on discute, pour finalement arriver à un accord.

Au final, qu’est-ce que cette crise aura changé dans l’Union ? Elle aura d’abord fait prendre conscience aux populations que la fermeture des frontières n’a pas empêché la pandémie de se propager, et que la contamination varie plus à l’intérieur de chaque État qu’entre les États. Puis elle aura permis de réaliser que l’Europe ne peut plus se permettre de dépendre ainsi de l’extérieur, notamment de la Chine, pour ses approvisionnements vitaux. Qu’il faut recréer en Europe des industries essentielles comme la santé, mais aussi le numérique. Avec la mainmise de la Chine sur des organismes internationaux comme l’OMS, l’Europe prend encore un peu plus conscience de son effacement sur le plan international. Les populistes n’ont plus le vent en poupe. À la sortie de cette crise, l’Europe sera affaiblie économiquement, mais renforcée dans sa cohésion et sa solidarité.

Claude Bardot, équipier dans les Hauts-de-Seine, secrétaire général de la section des Hauts-de-Seine du Mouvement européen