Comment influer et agir dans le monde de l’entreprise tout en étant en situation minoritaire ? Quand je me sens à contre-sens de mon organisation, quelle posture adopter ? Oliver Lasserre, formateur-coach en management, et Luc Pouliquen, consultant-coach, ancien manager et responsable de la qualité de vie au travail chez Airbus, ont apporté leur témoignage lors de conférence organisée par le MCC le dimanche 31 octobre, lors du rassemblement ignatien.

Un sondage a été rapidement fait parmi les participants. À la question « avez-vous été confrontés dans votre travail à une organisation contraire à vos valeurs », 49 % de l’auditoire a répondu rarement, 41 % a répondu régulièrement, 7 % très souvent, ce qui correspond à la moyenne. La nécessité de trouver du sens pour soi et du sens pour les autres est apparue importante.

1/Comment réussir à avoir de l’impact tout en restant aligné sur mes valeurs ? Pour Olivier Lasserre, ce qui doit être déterminant n’est pas de s’interroger sur le quoi ?, mais sur le comment ? Il convient de faire la différence entre, d’une part, l’influence positive qui vise mon intérêt et celui des autres, et d’autre part, la manipulation où je vise mon intérêt au détriment des autres ou en cachant la vérité. Aristote décline 3 leviers sous forme de 3 concepts :

  • Ethos: l’éthique, les valeurs. Si je suis aligné sur mes valeurs dans ce que je dis, ce que je fais et ce que je pense (viser la convergence dans l’intégrité, la congruence). Pour cela, il s’agit de prendre conscience des valeurs pour les vivre au quotidien, de prendre conscience aussi que certains principes ne sont pas négociables.
  • Logos: le message, la logique, le raisonnement ; il s’adresse à l’esprit rationnel de l’interlocuteur.
  • Pathos: la manière dont mon interlocuteur reçoit le message est liée aux émotions intérieures. Le pathos s’adresse au cœur de l’autre, soumis à diverses émotions.

En conclusion, Olivier Lasserre a invité l’assistance à repérer la joie, la douceur, l’amour, la paix, la bienveillance, la maîtrise de soi, à l’image de l’épitre de saint Paul aux Galates (5,22).

2/Luc Pouliquen a, de son côté, souligné l’importance de se recentrer sur ce « qui est essentiel pour soi », sur le choix à faire entre ce qu’il faut garder et ce qu’il faut jeter. C’est son « fil conducteur ».  D’où la question du sens puisque nous nous recentrons sur l’essentiel. Il a partagé ses pistes : la prière des psaumes, l’appui d’amis proches et le sens de l’humour.

Evoquant la souffrance au travail et la vague de suicides des salariés de France Télécom en 2009, il a affirmé que l’amour du prochain peut nous aider à contrer les RPS. Car si nous, chrétiens, gardons dans notre cœur le commandement de Jésus d’aimer son prochain, l’amour du prochain peut alors se décliner en valeurs communes telles que le respect, la dignité, l’écoute, l’accompagnement, la bienveillance, l’échange mutuel, l’équité, etc.

Il est important d’avoir une cohérence dans l’action entre les charges et les moyens, a ajouté Luc Pouliquen, ainsi que de savoir reconnaître ses erreurs, les corriger en collectif, parler avec l’autre. Cela favorisera une fécondité. La réception du rapport de la Commissions indépendante sur les abus dans l’Eglise, nous en fournit un exemple.

« Croire en soi et croire en l’autre » : cette croyance peut être performative. Si je crois aux deux ma croyance devient vraie. Si je fais confiance aux gens en osant risquer, j’obtiens le plus souvent satisfaction, je ne suis que rarement déçu. « C’est la greffe de l’arbre qui donne les racines » a conclu l’ancien manager chez Airbus.

Antoine Besserve, équipier à Paris