L’approche de l’économie basée sur le marché, le contrat, et l’échange souffre d’une limite importante : en circonscrivant le contenu de l’échange par le contrat, les acteurs se rencontrent seulement à travers les choses qu’ils échangent et l’activité économique ne crée pas de liens. Le marché établit des relations indirectes et anonymes entre les parties à l’échange qui restent ainsi indépendantes, et poursuivent leur intérêt personnel en bénéficiant d’une immunité mutuelle. L’activité économique ne participe alors pas à la constitution d’une communauté.


En s’appuyant sur les économistes napolitains du XVIIIe, Luigino Bruni propose une autre manière d’envisager l’économie, inspirée par une vision chrétienne : lorsque les parties assument le risque de la rencontre et de la blessure de l’autre, l’activité économique et l’échange ouvrent à une relationnalité vertueuse, qui laisse la place à l’imprévu qu’est l’autre et à l’amitié nourrie par la gratuité, participant ainsi à la constitution d’une « communauté ».

L’auteur invite à une réflexion critique à l’égard du modèle de l’économie libérale capitaliste, et ouvre à une pensée renouvelée de l’économie ; une économie pleinement humaine où la valeur de la relation est reconnue. L’ouvrage, facile à lire et très stimulant, passionnera tous ceux qui s’intéressent à l’entreprise et y voient un des fondements essentiels du lien social.

P. Baudoin Roger

La blessure de la rencontre, l’économie au service de la relation

Luigino Bruni, Préface de P.-Y. Gomez, Édition Nouvelle Cité 2014, collection GRACE, 235 p – 18 €