Discuter et dialoguer, une manière de faire bouger l’Eglise et de répondre à l’appel du Pape

Être passeurs d’avenir au sein d’une humanité confrontée à des enjeux inédits, telle est l’invitation du MCC à notre Congrès de 2021. Une occasion de réfléchir ensemble à notre rôle et à nos engagements, « au cœur des transitions du monde ».  

Si le monde est en crise, l’Eglise l’est aussi. Si nous voulons accompagner le monde dans ses transitions, il nous faut participer à celles dont notre Eglise a besoin, ne serait-ce que pour être crédibles aux yeux du monde. En ce temps de crise, ouvrir des espaces de dialogue est une manière de contribuer à la paix dont le monde a besoin*. Aujourd’hui l’enjeu n’est plus, pour l’Eglise comme pour nous croyants, de convaincre mais de marcher derrière et, quand le moment sera venu, de rompre et de partager le pain.

Depuis le début de son pontificat, le pape François appelle les fidèles à faire bouger l’Eglise. A de nombreuses reprises il nous a demandés, avec toujours plus d’insistance, d’aller vers les périphéries*, de dialoguer* avec tous, de marcher vers les pauvres, de dénoncer le cléricalisme*, les ors du pouvoir ou la médisance, bref de renoncer à la « nostalgie des habitudes qui ne sont plus porteuses de vie* ». L’Eglise n’est pourtant pas qu’une institution, avec ses textes, son droit, son autorité, ses clercs et ses erreurs. L’Eglise c’est aussi nous-mêmes. 

Nous voilà donc appelés à trouver pour l’Eglise de nouvelles voies de passage, nous qui sommes engagés dans le MCC. Or, dans sa spiritualité, sur le chemin d’Emmaüs comme et dans la vie de ses équipes, le MCC a dans sa poche un talent – qu’il lui revient de faire fructifier – celui du dialogue et de la discussion.

Le récit des pèlerins d’Emmaüs (Lc 24, 13-35), qui inspire notre méthode, nous rappelle que le Christ a pris le temps de marcher derrière les pèlerins et de les écouter discuter. Les disciples marchaient dans la direction opposée à Jérusalem15, lieu de la Résurrection, mais le Christ les suivait et marchait dans le même sens qu’eux, prenant le temps de les écouter discuter. N’est-ce pas notre charisme ? 

Au sein des équipes, le dialogue et la prière nous font vivre au rythme des rencontres ce souci de l’autre, cette fraternité qui s’apprend petit à petit et qui édifie chacun de nous. Ainsi, tous peuvent y être accueillis et se sentir à leur place, y compris ceux qui ne se voient pas comme des « représentants de l’Eglise », y compris les sœurs et les frères qui doutent ou qui ne dirigent pas leurs pas vers « Jérusalem » et se perçoivent même parfois comme « périphériques », voire qui croient marcher dans le mauvais sens.

Dans un monde où chacun prétend apporter des solutions toutes plus efficaces les unes que les autres, notre rôle n’est pas nécessairement là. Avec notre talent, ne serait-il pas plutôt d’entretenir la flamme du dialogue et de la discussion, sans avoir peur ni de marcher dans le mauvais sens, ni d’écouter ceux qui se croient perdus ? La foi, la tradition et la spiritualité de notre mouvement nous donnent des « outils », des manières d’être et non des réponses toutes faites. Le discernement, la fraternité, l’humilité ne sont jamais des solutions simples et prêtes à l’emploi.

Sommes-nous prêts, au nom de notre engagement et du talent qui nous a été confié, à être des acteurs du dialogue et de la discussion : dialogue avec la société dans sa diversité, dialogue avec les autorités, dialogue avec les sciences et avec les cultures, dialogue avec les autres croyants, dialogue avec ceux qui résident dans les périphéries ?

Pistes de réflexions

Comprendre les ruptures

  • Quelles sont mes expériences de l’Eglise, à la fois comme institution et comme communauté de fidèles ?
  • Parmi elles, lesquelles me font dire que l’Eglise a besoin de se transformer ?

Espérer pour demain

  • Parmi ces expériences d’Eglise, lesquelles ont eu pour moi la saveur de l’Eglise que je voudrais voir émerger ou se continuer demain ?
  • Est-ce que le MCC, dans sa spiritualité et dans la vie concrète en équipe constitue l’une de ces expériences ?
  • Comment est-ce que je cultive la mémoire et m’engage pour que perdure ces expériences d’Eglise ?

Agir dès aujourd’hui

  • Quels talents puis-je mobiliser pour « faire bouger l’Eglise » ?
  • Au sein du MCC, en équipes, en régions, quelles initiatives peuvent apparaitre comme des signes de dialogue avec ceux qui sont différents de nous ?

Pour aller plus loin, quelques références

Le pape François a pris de nombreuses fois positions pour une « transition ecclésiale ». Dès 2013, dans sa première Exhortation apostolique, La Joie de l’Evangile, on peut lire :

43 : « Aujourd’hui, certains usages, très enracinés dans le cours de l’histoire, ne sont plus désormais interprétés de la même façon et leur message n’est pas habituellement perçu convenablement. Ils peuvent être beaux, cependant maintenant ils ne rendent pas le même service pour la transmission de l’Évangile. »

238 : « Le dialogue social comme contribution à la Paix : L’Évangélisation implique aussi un chemin de dialogue. Pour l’Église, en particulier, il y a actuellement trois champs de dialogue où elle doit être présente, pour accomplir un service en faveur du plein développement de l’être humain et procurer le bien commun : le dialogue avec les États, avec la société – qui inclut le dialogue avec les cultures et avec les sciences – et avec les autres croyants qui ne font pas partie de l’Église catholique. »

239 : « Nous n’avons pas besoin d’un projet de quelques-uns destiné à quelques-uns, ou d’une minorité éclairée ou qui témoigne et s’approprie un sentiment collectif. Il s’agit d’un accord pour vivre ensemble, d’un pacte social et culturel. »

2014, dans son Discours de Noel à la Curie romaine, le Pape se veut lucide et sévère en constatant que le gouvernement de l’Eglise est exposé aux maladies, aux dysfonctionnements, aux infirmités. Il en dénombre une quinzaine « qui affaiblissent le service du Seigneur» : la maladie du pouvoir, le complexe des élus, l’agitation, la pétrification mentale qui engendre la perte de sensibilité humaine, la perte des sentiments envers son prochain, etc.

2014, Discours du Pape François aux Mouvements populaires (oct. 2014) : « Nous voulons que l’on écoute votre voix qui, en général, est peu entendue. Sans doute parce qu’elle gêne, sans doute parce que votre cri dérange, sans doute parce que l’on a peur du changement que vous exigez, mais sans votre présence, sans aller réellement dans les périphéries, les bonnes intentions et les projets que nous écoutons souvent dans les conférences internationales restent limitées au domaine des idées, c’est mon projet. »

En 2018, avec sa Lettre au Peuple de Dieu écrite dans le contexte de la crise des « abus sexuels », la « saine transformation » qu’il évoque et invoque, n’est plus seulement une affaire de famille ayant son propre linge sale à laver. L’Eglise « discréditée10 » se voit dans l’obligation de montrer au monde qu’elle porte une espérance profonde et sincère malgré son image dégradée et la crise de confiance qu’elle traverse11. Cette crise y est présentée comme une occasion de remettre en question une vision fausse de l’autorité, le « cléricalisme ».

Je peux aller consulter l’un de ces textes :

https://www.mcc.asso.fr/la-demarche-d-emmaus-explication/

https://www.mcc.asso.fr/vie-dequipe-chemin-demmaus-quand-toute-une-equipe-se-met-a-lecoute/

Également une conférence très inspirante sur la synodalité –  conférence de Bruno Cadoré du 111020

 

DOCUMENTS À CONSULTER